POIDS ET MESURES à VAUX-SUR-MER en
1774
Par Marie-Claire André-Delhaye
Entre les provinces du royaume de France, les unités de surface, de volume ou de poids ont des valeurs aussi diverses que variées d'une ville à l'autre. Pour ajouter à la confusion, ces unités portent le même nom malgré leurs différences : les longueurs s'appellent toujours point, ligne, pouce, pied, toise, perche, palme, lieue ou aune; les volumes boisseau, setier, picotin, litron, velte, muid ou tonneau; les poids livre, denier, gros ou grain. Le système des poids et mesures est complètement incohérent, que ce soit en France ou dans les autres pays d'Europe. L'étalon de longueur est en principe la toise qui fait 6 pieds-de-Roi ; mais ce pied n'est pas la longueur comprise entre le talon et les orteils, mais celle couverte par quatre paumes, la paume étant la largeur de quatre doigts posés à plat. Comme ces doigts peuvent être longs et fins, ou courts et boudinés, la paume est à géométrie variable ; il en résulte que la valeur d'un pied varie de 20 % d'une province à une autre. Il en va de même de l'aune ou de la lieue. Quant aux unités de volume, bichets, boisseaux et autres muids, c'est pire encore : avec 10 boisseaux d'une ville on en remplit 15 de la cité voisine. De plus, bien que portant le même nom, les boisseaux, setiers et autres unités de volume ont des contenances différentes suivant qu'ils servent aux liquides ou aux grains et les échelles de multiples et sous multiples ne sont pas cohérentes et varient selon les régions. Les noms de ces anciennes mesures sont, dans toutes leurs variantes, souvent très imagés, et attachés soit aux dimensions de l'homme (pied, pouce...), soit à ses aptitudes (journal : étendue de terre travaillée en un jour...) Au cours de l'Histoire, des tentatives plus ou moins fructueuses ont été lancées pour fixer la valeur de quelques grandeurs de première nécessité. L'une d'entre elles est proposée en 1774 par Turgot, contrôleur des Finances. C'est un travail difficile d'unification des mesures. En 1776, Turgot est remplacé par Necker et la réforme est abandonnée. Nous possédons une copie du questionnaire concernant la paroisse de Vaux-sur-Mer, trouvé aux Archives Départementales 17. Le questionnaire est un imprimé, les réponses sont écrites à la main. Nous reproduisons le document selon l'orthographe de l'époque.
"Renseignemens à fournir pour se conformer aux ordres du Roi, notifiés par M. le Contrôleur
général, pour tout le Royaume.
Ces renseignemens seront donnés pour la paroisse de Vaux, par le syndic de ladite paroisse,
assisté des plus notables Habitans & inscrits à la marge ci-contre, à côté des questions. Ils
seront envoyés au plutôt à M. le subdélégué de Cognac. L’état comprendra tant les réponses de ce qui est possédé par les privilégiés comme par les taillables. Fait le 15
Juillet 1774 Quel est le nombre de jours de marché par semaine ou par mois. Il n’y en a point. Quelles sont les mesures du lieu. On mesure à la latte de 12
pieds.
Sçavoir
Mesures d’étendue, leur dénomination en quartier, journal, arpent ou autre. Combien le quartier contient-il de toise ; la toise de pieds en tous sens, faisant 36 pieds de superficie.
Combien le journal. 200 carreaux.
Combien le carreau. 12
pieds quarré.
Mesures de poids.
Combien le boisseau de froment pèse- t- il de livres, poids de marc de 16 onces. 70 livres. Combien pese le boisseau de seigle. 70 livres.
Combien le boisseau d’orge. 55 livres.
Combien le boisseau d’avoine. 50 livres.
Quelles sont les autres
mesures de poids, leur nom & leur force. Crochet & ballance on conte 6 onces à la livre.
Mesures de
contenance.
Combien le tonneau contient-il de pintes, mesure de Paris. 200 pintes.
Combien la barrique. 27 veltes.
Combien la velte. 8 pintes.
Quelles sont les autres
mesures, leur nom & leur contenance. Il y a quatre carts et huit 8ème
à la
velte.
Combien de charrues dans la paroisse. 34 Combien de journaux, mesure du pays, cultivés par la charrue. 340
Combien de journaux, mesure du pays, cultivés à bras, en grains propres à faire farine, ou à en tenir lieu. 80 journaux, 90 journaux ne se peuvent ensemencés que tous les trois ans consistant en moutague.
Combien de boisseaux de
grains, mesure du pays, ensemencé par an, en froment. 57. En seigle. 7
En orge & baillarge. 22 En avoine.
23 En blé
d’Espagne. 5
Année
commune
Quelle est, année commune, la proportion de la semence à la récolte, en froment, c’est-à-dire, combien un boisseau de semence rapporte-t-il de boisseaux à la récolte. 2 boisseaux ½.
Quelle est cette proportion pour le seigle. 2 boisseaux
Quelle est cette proportion pour l’orge. 3 boisseaux
Quelle est cette proportion pour l’avoine. 2 boisseaux ½
Quelle est cette proportion pour les menus grains. 2 boisseaux, lesquels se mangent
actuellement en herbe ou vert.
Quelle est la quantité de boisseaux de froment, mesure du pays, récoltés année commune. 285 boisseaux.
Quelle est cette quantité pour le seigle. 14 boisseaux
Pour l’orge et baillarge. 66 Pour l’avoine. 58
Pour les menus grains. Se mange en vert.
Quelle est la proportion de la semence à la récolte, en froment. 228 boisseaux
Quelle est cette proportion en seigle. 12 boisseaux
Quelle est cette proportion en orge et baillarge. 44 boisseaux
Quelle est cette proportion en avoine. 36 boisseaux
Quelle est cette proportion en blé d'Espagne. 30 boisseaux
Quelle quantité de journaux, mesure du pays, est cultivée en vigne.500 journaux.
Combien récolte-t-on de veltes de vin, mesure du pays, année commune. 6750 veltes Quelle est la récolte de 1773. 250 barriques
Quel est le nombre de chevaux. 30 chevaux
Quel est le nombre de bêtes à laine. 200
Quel est le nombre de bêtes à cornes destinées à la culture. 8
Quel est le nombre de bestiaux destinés à l’engrais. Il n’y en a point. Néant.
La récolte en grains est-elle suffisante pour la consommation de la paroisse, ou ne récolte-t-elle que la moitié, le tiers, le quart ou tout autre proportion de sa consommation ; ou la récolte est-elle supérieure à la consommation, d’un quart, d’un tiers, d’une moitié, de trois quarts, ou est-elle le double ou le triple ? Elle n’a pu produire de revenu qu’à la sixième partie pour l’entretien de la consommation.
Pour le vin, mêmes questions que pour le grain.
Au regard du vin ! Il n’est pas pour ainsy dire sufizant pour les façons et cultures nécessaires
!"
Sources : Archives Départementales 17
Littré édition 1875